Artisans de réconciliation : la vocation des chrétiens

Prière pour la paix, à l’entrée de la cathédrale orthodoxe de Timisoara

Pas de paix sans justice, entend-on souvent. Mais pas de paix non plus sans pardon, ni réconciliation. L’atelier sur  « l’éthique de paix et de non-violence » dans le cadre de la rencontre de Timisoara (Roumanie, 16-19 novembre 2023) d’« Ensemble pour l’Europe »   s’est conclu par un vibrant appel à la réconciliation et un non moins intense temps de prière pour la paix

Pour le luthérien Gerhard Pross, modérateur d’« Ensemble pour l’Europe », sans justice, il n’y a pas de paix. Mais la justice ne suffit pas : la réconciliation est aussi nécessaire. A quel renoncement cela nous appelle-t-il ? Les humiliations sont des vecteurs de violence. Les demandes de pardon apportent la réconciliation. Il faut parfois se mettre à genoux pour reconnaître que les autres sont là. Et entourer les personnes de bénédiction pour pouvoir les rencontrer en vérité.

Margaret Karram, la présidente du mouvement des Focolari et citoyenne d’Israël, d’origine palestinienne, a ressenti une grande douleur le 7 octobre 2023, quand le Hamas a massacré plus de 1000 israéliens, puis avec la guerre qui s’en suivit. « Pour vaincre le mal nous devons augmenter le bien, dit-elle. Il y a tant d’organisation qui travaillent pour le dialogue et la paix en Terre sainte. Mais on ne leur donne pas la parole ».

Chaque peuple a le droit de vivre dans la paix et la justice, d’avoir une patrie et de se déplacer librement. Tant les Palestiniens que les Israéliens. Rechercher la justice sans perdre quelque chose n’est pas possible. Vouloir tout avoir conduit à ne rien avoir. Il faut trouver une solution où chacun peut garder sa dignité. Perdre quelque chose est une logique qui n’est pas humaine, mais elle est indispensable pour vivre en paix.

Pour E. Heger, ex-président et premier ministre de la Slovaquie, dans chaque réconciliation, les deux paroles indispensables sont « s’il vous plaît, pardonnez-nous » et « nous sommes navrés ».  Dans son pays, cela a été fait à l’égard des juifs, après la deuxième guerre mondiale. Dire « pardonne-moi » dans le monde politique est très difficile. Mais en tant que chrétiens, nous devons aider les politiciens à le faire.

Un membre de la communauté de Sant’Egidio affirme que rien ne remplace la rencontre directe et personnelle. François d’Assise a rencontré le Sultan en Égypte, en étant désarmé. Le sultan l’a reçu et ils sont devenus amis. C’est aussi l’expérience de sa communauté, depuis 37 ans lors des rencontres annuelles dans « l’esprit de Assise ».

La conviction de Mgr József-Csaba Pál, évêque catholique de Timisoara, est que « Jésus a tué l’inimitié dans son propre corps crucifié. Laisser vivre le Ressuscité en nous donne le cadeau de la paix aux autres. Quand nous regardons à Dieu, nous pouvons regarder les autres. Il faut constamment s’entraîner à cela ».

Une prière pour renforcer le travail pour la paix

Après cet atelier nous nous sommes rendus à la Cathédrale orthodoxe pour participer aux vêpres conduites par le Métropolite Ioan du Banat. Elle a été suivie par une prière pour la paix. Voici quelques paroles dites lors de ce moment fort :

« Cette célébration est un rappel de ne jamais cesser de s’engager pour la paix. La guerre ne doit pas servir de moyen de résolution des conflits, comme cela a été tenté à nouveau au cours des dernières décennies et comme cela a lamentablement échoué.

Il faut renforcer et développer une alternative décrite dans le vieux rêve du prophète Esaïe : « Avec leurs épées, ils forgeront des socs de charrue, et avec leurs lances, ils feront des faucilles. On ne lèvera plus l’épée un pays contre l’autre, on ne s’exercera plus à la guerre » (Es. 2,1-5)

C’est une vision de la cohabitation de tous les peuples et de toutes les cultures dans la paix. Nous devons faire davantage pour éviter que le feu de la guerre et de la violence ne se propage à nouveau et n’embrase le monde entier, comme cela s’est produit deux fois au 20e siècle à partir de l’Europe.

Nous devons renforcer le travail en faveur de la paix, en nous appuyant sur l’héritage de ces dernières décennies en Europe – par exemple la chute du mur de Berlin – et exporter cette vision d’une cohabitation entre les différents groupes, religions, visions du monde et langues qui caractérise notre société européenne – même si nous n’y parvenons pas toujours totalement.

Puisse la souffrance des victimes de la guerre et de la violence renforcer cette conviction et cet engagement ! »

Martin Hoegger

(755 mots)


Publié

dans

,

par

Étiquettes :

Commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *