Le repas d’Emmaüs: un collage fait en groupe
Par Martin Hoegger
La rencontre d’« En Chemin Ensemble » de cette année s’est penchée la dynamique des « minorités créatives ». Une centaine de personnes d’une vingtaine de communautés et mouvements se sont donné rendez-vous à Montmirail (NE), les 22 et 23 mars 2025. (* Kairos est un mot grec signifiant un « moment favorable »)
Face au chaos et à la crise qui touchent de nombreuses grandes Églises, la question se pose, en effet, si une période particulière pour les petites communautés et les mouvements est arrivée.
Alexandre Bischof, membre de la communauté Don Camillo, maîtresse de ces lieux, constate que les communautés sont une minorité, mais forte et créative. Selon la parole du Christ, nous n’avons pas à avoir peur : « ne crains pas petit troupeau ». D’autre part, il est bon que les chrétiens ne soient pas trop en masse. « Quand ils l’ont été, cela n’a pas toujours donné de bons résultats. Ils sont le sel de la terre, mais trop de sel est plus indigeste que la fadeur », dit-il.
L’art d’aimer construit l’unité.
József-Csaba Pál, évêque catholique de la ville de Timişoara (Roumanie), sait ce que cela signifie de vivre en étant minoritaire au milieu d’une multitude de confessions. Sa contribution a été le point fort de cette rencontre. Sept groupes ethniques (Hongrois, Roumains, Allemands, Croates, Bulgares, Slovaques, Tchèques) constituent son diocèse. Cette diversité fait partie de la normalité de la vie. Mais cet héritage historique n’est pas encore une garantie pour l’avenir. « Ce n’est que si nous construisons sur un fondement solide, sur Jésus qui a donné sa vie pour l’unité des hommes avec Dieu et entre eux, que nous pouvons espérer que les personnes continueront à l’avenir à se traiter avec respect et amour », affirme-t-il.
Construire l’unité commence chez nous
Vivre la communauté, construire l’unité commence dans sa propre maison, dans sa propre famille. De même, l’œcuménisme commence aussi par la création d’une communauté dans notre propre Église, en s’écoutant en profondeur les uns les autres et en mettant en pratique le commandement nouveau du Christ. « Cela donne un fondement à l’unité. L’œcuménisme est alors une conséquence naturelle de ce mode de vie ».
Les relations œcuméniques naissent justement en faisant le premier pas et en reconnaissant Jésus en l’autre, etc. Et de raconter comment une belle relation s’est développée avec l’évêque orthodoxe et davec des jeunes pour préparer un festival des jeunes. « Nous ne savons pas où nous mènent des pas vécus dans l’amour. Laissons-nous surprendre » ! Plus tard, à sa consécration épiscopale plusieurs évêques des autres Églises sont venus avec une trentaine de jeunes orthodoxes.
« C’est précisément parce que je veux vivre pour l’unité souhaitée par Jésus que je ne veux pas manquer une occasion de construire des ponts entre les gens », dit J. Pal avec conviction et ajoute : « Le Père céleste est heureux quand ses enfants se comprennent et se rencontrent ».
Les « Églises mobiles »
J. Pal est aussi convaincu de l’importance des petits groupes, où l’on peut faire l’expérience de la communion. Ces « Églises mobiles » germent et grandissent grâce à l’écoute de la Parole de Dieu qui nourrit l’amour mutuel. Il y en des quantités dans son diocèse. On y apprend à accueillir la diversité : « Le fait que l’autre soit différent nous dérange si nous n’aimons pas, mais nous enrichit si nous aimons ».
« C’est ce genre d’Église qui me plaît, une telle Église a des perspectives d’avenir. C’est le temps du kairos, des minorités créatives. Ces petites initiatives sont des graines de moutardes qui apportent l’espérance ». Ces communautés renouvellent les grandes. Le défi est de passer du groupe à la communauté où on s’ouvre les uns aux autres,
Les disciples d’Emmaüs, une « minorité créative »

Le repas d’Emmaüs: collage terminé
L’autre point fort a été le récit d’Emmaüs (Luc 24,13- 35). La présence du Christ à côté des deux disciples en marche et le partage du repas avec le Seigneur leur ont permis de sortir du chaos, de la crise et du désespoir. Ils découvrent ainsi une nouvelle vie et retournent auprès de leurs frères et sœurs pour partager avec eux leur expérience. Eux aussi étaient « une minorité créative » ou des « Églises mobiles ».
L’après-midi du samedi, une bonne heure a été consacrée à une promenade, deux par deux, comme les deux disciples d’Emmaüs, afin de partager ce qui nous habite. Et le soir un culte avec Sainte cène a permis à Heiner Schubert d’exprimer ses talents, en racontant et en dessinant ce récit.
« L’étranger d’Emmaüs ne pourrait-il pas aussi s’infiltrer dans nos réunions d’Églises, pour renouveler son espérance », se demande une pasteure reliée à la communauté Don Camillo ? Le lendemain, lors de la célébration de la messe, J. Pal a expliqué que les deux disciples avaient reçu un appel, mais pas encore une mission. Mais ils l’ont reçue quand leur cœur brulait intérieurement. Alors ils se sont rendus en hâte pour annoncer la grande nouvelle de cette rencontre. De même, « quand la parole brûle dans notre coeur nous recevons une mission », conclut J. Pal.